Histoire de voir … histoires au pluriel
24 octobre 2023 à 13h00 au 24 octobre 2025 à 14h00
L’éducation populaire quesaco ?
L’éducation Populaire ? Il nous arrive très souvent de qualifier d’éducation populaire les actions menées par l’association PourQuoiPas. Certes mais encore faudrait- il en avoir une idée plus précise. L’éducation populaire n’est pas un “fourre-tout”, coincé entre éducation nationale et mouvement associatif.
L’éducation Populaire ? C’est encore moins un “objet” non commercial comme nous l’explique théocratiquement pardon, technocratiquement (néologisme quand tu nous tiens) les nouvelles générations de “sachant(s)” publics ou privés qui tiennent les cordons de la bourse aux subventions, obligeant trop souvent les tenants de ce courant à des contorsions idéologiques pour obtenir quelques monnaies sonnantes et trébuchantes.
Si l’on en croit une rapide définition, l’éducation populaire est basée sur un ensemble de pratiques sociales, culturelles et politiques destinées à transformer la société et travailler à l’émancipation des individus et des peuples, leur donnant ainsi les moyens d’agir le plus démocratiquement possible en référence aux principes de la Révolution française.
Ainsi tout le monde apprend de tout le monde, car le savoir est l’affaire de tout.es et non pas l’apanage des universitaires et autres sommités qui maîtrisent sans nul conteste des savoirs, mais pas tous les savoirs, et comme tous les autres ont à nourrir leur imaginaire par les rencontres, les échanges, les confrontations avec d’autres évitant ainsi l’entre soi qui nous enferme tous.
D’où la nécessité de se rencontrer, d’échanger avec l’Autre afin de ne pas séparer l’action et l’analyse.
Un peu d’histoire 1
C’est en prolongeant les déclarations de Condorcet sur l’idée d’une « éducation populaire »2, que le mouvement ouvrier français naissant organise des amicales, mutuelles et coopératives dans les années 1810-1820, pour contourner l’interdiction des syndicats par la loi Le Chapelier en 1791.
Après que la répression de la Commune lui a brisé les reins, le mouvement ouvrier, dans les années 1890 aboutit à la création des Bourses du travail pour développer sa vision émancipatrice de la culture populaire et son organisation.
Trois courants s’inscrivent dans cette construction en plus du courant ouvrier et révolutionnaire. Un courant laïc républicain et un courant chrétien social.
Dans les années 1920/1930 le mouvement s’institutionnalise, amplifié sous le régime de Vichy qui mobilise la jeunesse pour sa Révolution Nationale. En parallèle la Résistance créée ses propres organisations de jeunesse comme les Francas et Peuple et Culture (dont le manifeste se propose de « rendre la culture au peuple et le peuple à la culture »).
A la Libération une Direction de l’éducation des adultes et de l’éducation populaire est mise en place au sein du gouvernement. Elle est diluée en 1948 dans une Direction générale de la jeunesse et des sports, signe de la perte de son ambition politique au grand dam des jeunes résistants.
Des années 50 jusqu’à 68. L’idée de pédagogie de la démocratie est abandonnée par les institutions, l’orientant vers l’animation socio-culturelle, rattachée aux loisirs qui se développe dans les MJC, Comité d’Entreprise, associations diverses, entraînant tout à la fois une professionnalisation et un encadrement de cette nouvelle filière, l’éloignant ainsi de la vocation première de partage des savoirs et sa vocation émancipatrice.
Toutefois l’après 68 par son « élan subversif et autogestionnaire, » va voir renaître cette vocation alternative.
Parmi les regroupements de cette fin de XXe siècle apparaissent des associations comme la SCOP le Pavé, ATTAC parmi les plus connus, l’apparition dans de nombreuses villes d’Université Populaire du savoir comme l’UPB à Bordeaux, qui pratiquent et remettent en avant les conférences gesticulées et autres arpentages littéraires, autant de méthodes d’éducation populaire sans oublier le terrain de la rue avec les Nuits debout en passant par les Gilets Jaunes sur les ronds points.
En résumé, l’éducation populaire concourt à la constante transformation de la société en contribuant à construire des alternatives éducatives, économiques, sociales et politiques dans lesquelles les individus soient co-auteurs de leur devenir.
Les valeurs fondamentales qu’elle défend et qui fondent son action sont l’émancipation, la coopération, la solidarité, la justice.
Alors pour l’assoPourQuoiPas, à l’image des dernières rencontres qu’elle a organisé autour d’ Exils, les mondes de l’exil d’hier et d’aujourd’hui, sa filiation est bien sur l’éducation populaire.
2 En 1792, en pleine révolution, Condorcet remet à l’Assemblée législative un Rapport sur l’instruction publique dans lequel on peut lire : « Tant qu’il y aura des hommes qui n’obéiront pas à leur raison seule, qui recevront leurs opinions d’une opinion étrangère, en vain toutes les chaînes auraient été brisées, en vain des opinions de commandes seraient d’utiles vérités. Le genre humain n’en resterait pas moins partagé entre deux classes : celle des hommes qui raisonnent, et celle des hommes qui croient. Celle des maîtres et celle des esclaves ».
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