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Attaquer la terre et le soleil de Mathieu Belizi.

PourQuoiPas un moment de littérature émancipatrice ? Martine Descoubes et Bertrand Gilardeau dans ce dialogue, nous font entendre les  voix d’une femme colon et celle d’un soldat dans l’Algérie des années 1840. 

De quel livre et de quel auteur sera-t-il question aujourd’hui ?

– le livre c’est : Attaquer la terre et la soleil, paru en 2022 aux Editions Le Tripode, l’auteur est Mathieu Belézi. Ce court roman traite de la période de peuplement lors de la colonisation algérienne aux 19e siècle à travers le destin de colons et de soldats.

RESUME : Au milieu du 19e siècle quelques familles comme celle de Séraphine, modestes et trompées par la propagande débarquent en Algérie où devaient les attendre terres arables et richesses programmées. En lieu et place ils basculent dans un enfer de violence, entourées de soldats terrifiants face à une population révoltée et attachée à l’indépendance de son pays.i

– Le récit se déroule donc en Algérie, au milieu du 19e siècle. Que sait-on plus précisément de cette période ?

– Nous sommes au moment où après avoir renoncé à l’esclavage la France devient un empire colonial, remplaçant la traite négrière par le travail forcé, assujettissant et massacrant dans le bruit et la fureur ( pour faire référence à Faulkner), car si par la force armée les conquêtes se multiplient, il faut aussi installer dans les pays colonisés des métropolitains qui seront donc les colons chargés d’introduire «la civilisation occidentale » à des peuples barbares.…

– Ainsi l’action du roman se situe-t-elle entre 1830, date de la dite conquête de l’Algérie et de la première vague de peuplement

– c’est-à-dire celle des militaires qui deviennent des colons en s’installant et aménageant le territoire conquis et 1860 où on promet à des familles françaises, qui connaissent des difficultés économiques une espèce d’Eldorado. Ces familles viennent d’ailleurs essentiellement d’Alsace et de Lorraine d’où sont originaires la famille de colons dans le roman de Bélézi.

– Comment cet aspect historique est-il rapporté dans Attaquer la terre et le soleil ?

– d’une part à travers le le personnage de Séraphine femme colon arrivée depuis sa Lorraine natale dans les années 1840 avec son mari, ses enfants, sa sœur et son beau-frère.

Nulle idéologie chez cette femme, elle s’est contentée de suivre les conseils des autorités françaises qui faisaient miroiter une terre vierge à exploiter et d’autre part à travers le propos d’un soldat de l’armée française d’occupation, chargée de protéger ces familles.

– Comment cette tragédie est-elle racontée ?

– de façon très réaliste, très minimaliste du point de vue du récit lui-même : pas d’épopée, pas de héros, pas de rebondissements spectaculaires, pas de sentimentalisme : des faits crus et cruels, des réalités terribles et implacables.

– Qui raconte ces faits ?

– le roman raconte à deux voix : celles de Séraphine dont la parole fonctionne comme une complainte, une litanie, et de ce soldat, au discours violent et sans trace d’humanité. Et ces deux voix qui alternent, racontent une effroyable conquête de l’Algérie.

Dès lors le lecteur est littéralement plongé dans un enfer cruel et impitoyable, qui est illustré d’ailleurs par les titres donnés aux différents chapitres : « rude besogne »  quand Séraphine s’exprime et « besoin de sang » quant à la parole du soldat.

– Oui car ce roman est aussi un expérience de lecture.

– complètement ! C’est un texte quasiment sans ponctuation, qui est scandé comme un cri : un récit litanique aux longs couplets, d’une tristesse infinie, un chant de l’absurde et de la sauvagerie humaine. Le récit est rédigé en courts chapitres avec de fréquents retours à la ligne sans majuscules, comme des vers libres, ce qui lui donne un effet d’oralité.

Cette puissante et envoutante mélopée rend le roman violent et implacablement pessimiste.Le électeur attend an vain un sursaut, de l’apaisement, du calme : il est possédé par cette forme d’écriture qui transcende le contenu.

Car il n’y a en fait aucun espoir, aucune échappatoire, aucun salut. Chaque personne est condamnée à la désillusion.

Comme le soldat croyant être présent pour participer à la «pacification» du pays, et qui en fait assistera aux pires atrocités. Il finira même par y prendre part dans une sorte d’ivresse de la violence, sans même en comprendre le sens.

Tout comme les colons qui sont confrontés successivement à la rudesse du climat, aux terres difficiles, au choléra, aux fièvres et aux fauves.

– Et que sait-on de l’auteur : M. Bélézi ?

– c’est un écrivain contemporain salué par la critique depuis vingt ans mais encore méconnu du grand public. Il est né à Limoges en 1953, il y fait des études de géographie, puis enseigne en Louisiane, vit successivement au Mexique, au Népal en Inde et maintenant en Italie. Il se consacre à l’écriture à partir de 1999.

– Quelle est la place du thème algérien dans son oeuvre ?

  • – Attaquer la terre et le soleil renvoie à sa grande trilogie algérienne, publiée

  • aux éditions Albin Michel :

  • C’était notre terre, 2008 et Flammarion

  • Les vieux Fous, 2011

  • Un faux pas dans la vie d’Emma Picard, 2015.

  • – le roman fait écho également à Le Petit Roi, son premier roman publié en 1998 aux éditions Phébus.

– enfin le livre a reçu le PRIX DU MONDE en 2022, le PRIX DU LIVRE INTER 2023 ainsi que le Prix des lecteurs des Escales du livre de Bordeaux de 2023.

La famine en Algérie Gustave Guillaumet

Les colons alsaciens lorrains après 1870 en Algérie

Le transport des colons français vers l’Algérie par les canaux du Centre en 1848

Après les révoltes de Juin 1848, le gouvernement organisa le départ de 12.000 ouvriers français et leurs familles pour l’Algérie, en vue d’y établir des colonies agricoles. Ce déplacement de population permettait aussi de lutter contre le chômage et d’éloigner des grands centres une partie de ceux qui avaient participé aux troubles.

Le décret du 20 septembre 1848 stipulait que les colons devaient être dirigés sur l’Algérie dans les plus brefs délais possibles. Pour y satisfaire le Ministère de la Guerre, chargé de son application fut contraint de mettre en place rapidement une organisation pour déplacer économiquement, et en quelques mois, ces 12.000 hommes, femmes, enfants et leurs bagages. Les moyens de transport existant à l’époque n’étaient pas adaptés à un tel mouvement, le nombre de diligences était insuffisant et le prix du transport par ces voitures insupportable. Le déplacement à pieds, comme c’était l’habitude pour l’armée, n’était pas humainement envisageable pour ces gens, même en mettant des chariots à leur disposition. Enfin, s’il était possible de transporter les colons par bateau sur la Seine et le Rhône, il n’existait pas de transport organisé par ce moyen sur le trajet entre les deux fleuves.

Une mission exploratrice fut confiée à l’Agence générale des Bateaux à Vapeur en vue de trouver une solution à ce problème, prévoyant des déplacements par groupes de 800 personnes, au départ de Paris.
Les conclusions de l’étude firent apparaître la possibilité d’organiser des convois de bateaux de transport de marchandises aménagés sommairement qui, après avoir remonté la Seine jusqu’à Moret, emprunteraient successivement les canaux du Loing, de Briare, latéral à la Loire et du Centre jusqu’à Chalon-sur-Saône. De Chalon-sur-Saône à Arles, la Saône et le Rhône seraient descendus par bateaux à vapeur jusqu’à Arles. De cette dernière ville, pour atteindre Marseille; port d’embarquement pour l’Algérie le parcours se ferait par chemin de fer, la ligne ayant été construite récemment.

Le temps total de transport évalué était de 18 jours de Paris aux lieux d’implantation des colons en Algérie. De 13 à 15 jours étant nécessaires pour le trajet de Paris à Marseille, avec une circulation de nuit sur les canaux et passages prioritaires des écluses.
Il était prévu que la remontée de Paris à Moret se ferait par remorquage avec des bateaux à vapeur et qu’ensuite, sur les canaux, le halage serait fait par des hommes à raison de 2 à 8 hommes par bateau. Mais, le premier convoi ayant subi des retards importants, dus à des pannes sur les bateaux à vapeur, il fut décidé de haler avec des chevaux les convois suivants. Ce remorquage nécessitait 18 chevaux par convoi.

Organisation et fonctionnement des convois

Pour le trajet de Paris à Chalon/Saône on utilisa des chalands de Loire, d’une longueur limitée à 27 mètres en raison des écluses. Un convoi comportait 5 chalands cabanés, probablement des sapines. Chaque bateau pouvait recevoir de 150 à 180 adultes et enfants de plus de 2ans et 10 enfants de moins de 2 ans. Chaque chaland avait son chef de bateau et un chef de groupe pour 12 personnes. Un chaland et une allège servaient au transport des bagages. Un bateau “Etat Major”, avec un capitaine chef de convoi et un lieutenant adjoint avait à son bord un docteur, un officier comptable et un représentant civil du transporteur chargé de l’intendance jusqu’à Chalon. Ce bateau était équipé d’une ambulance, d’une cuisine et d’une remise pour les denrées: pain, vin…L’équipage du convoi y avait son logement.
Le convoi était régi militairement. Sa marche était suivie de brigade en brigade par la gendarmerie prête à prêter main forte au capitaine en cas d’ incidents internes au convoi ou avec la population des régions traversées. Le capitaine pouvait infliger des peines aux auteurs de fautes graves: soit le renvoi à Paris, soit le débarquement du fautif qui se trouvait dans l’obligation de rejoindre Marseille à pieds ou d’abandonner le convoi. Cette dernière peine étant surtout appliquée aux chefs de famille, femme et enfants restant à bord.

L’ensemble du transport des 12.000 colons nécessita 17 convois.

Le voyage .

De Paris à Melun les colons furent obligés de rester à bord. Mais sur les canaux la vitesse du halage qui n’était que de 2 km/heure et le passage des écluses permirent aux colons de descendre des bateaux et d’y remonter facilement quand ils le souhaitaient. Ils pouvaient avoir des occupations et rejoindre facilement le convoi à pieds.
Ainsi les femmes purent laver le linge, aller acheter des fruits et certains hommes allèrent à la pêche et dans les tavernes des villages traversés.

La traversée de la Loire à Briare causa des frayeurs aux passagers, à cette époque le pont-canal n’existait pas et il fallait naviguer en Loire pendant un peu plus d’un kilomètre. Le halage dans le fleuve et l’entrée et la sortie des bateau aux écluses nécessitaient des manœuvres intimidantes en raison des dangers qu’elles présentaient.
La progression des convois se fit inexorablement, mais des accidents occasionnant des morts et des blessés se produisirent à chaque convoi. Les morts résultaient de noyades ou de maladies et les blessures étaient principalement dues à des rixes entre colons. En comptant les exclus par décision des capitaines et ceux qui quittèrent volontairement les convois en cours de route, plus de 600 personnes n’atteignirent pas l’Algérie.

Arrivés à Châlon, les colons de chaque convoi étaient transbordés en 2 heures sur 3 ou 4 bateaux à vapeur de 50 à 60 m de long qui effectuaient le trajet jusqu’à Lyon dans la journée. Là, en raison des difficultés de passage des ponts il fallait quitter ces bateaux. Une escale de plusieurs heures était nécessaire pour effectuer le trajet d’amont en aval de la ville. Les colons reçurent des billets de logement et passèrent la nuit chez l’habitant dans des locaux réquisitionnés, ce qui ne plut guère à leurs propriétaires, d’où des incidents.
Le matin les bateaux du Rhône qui avaient reçu les bagages dans la nuit chargèrent les colons. Normalement 3 bateaux, approchant 70 m de longueur, devaient suffire pour un convoi. Mais, en raison de basses eaux, il fallu parfois 5 bateaux pour un convoi. Le trajet de Lyon à Arles se faisait en deux jours.

Arles était atteint en soirée. Il fallait passer la nuit en ville avec des billets de logement et un accueil particulièrement mauvais des habitants. Enfin, à l’aube, c’était le départ pour le trajet en chemin de fer jusqu’à Marseille qui durait environ 5 heures. Les colons y étaient accueillis par les autorités et embarqués sur des frégates à vapeur de la Marine.

Après deux à trois jours de navigation en mer les colons atteignaient l’Algérie ou l’accueil était chaleureux ce qui leur donnait du courage. Mais à l’arrivée, sur les lieux d’installation, ils découvraient peu ou pas de locaux pour leur habitat et des terres en friche. Néanmoins, malgré les hécatombes dues aux épidémies de choléra et au paludisme ces pionniers réussirent leur implantation.
Ce périple montre que nos ancêtres avaient réussi un exploit technique, celui d’avoir transporté en peu de temps une population non préparée à cette expédition et ce avec une utilisation rationnelle des moyens disponibles à cette époque.
D’après “En chaland de Paris à Marseille en 1848” par Simone et Emile Martin-Larras
(http://www.larousse.fr/encyclopedie/article/Le_transport_des_colons_sur_les_canaux/11003111Cahiers du Musée de la Batellerie de Conflans Ste-Honorine n°18 et 19).

La famine en Algérie Gustave Guillaumet

La famine en Algérie Gustave Guillaumet

Qui est Gustave Guillaumet ?

Le peintre Gustave Guillaumet (1840-1887) est l’une des figures les plus marquantes de l’orientalisme français. Pourtant, bien que très présent dans de nombreux musées de France, et dans les principales expositions consacrées à la peinture orientaliste des dernières décennies, son œuvre reste peu connu.

Né en 1840 à Puteaux, d’une famille de teinturiers dont les moyens lui permettent de se consacrer pleinement à son art, il découvre l’Algérie un peu par hasard alors qu’il devait s’embarquer pour l’Italie. Il est fasciné par ce qu’il y voit et consacrera sa vie à peindre ce pays qu’il est l’un des premiers artistes à avoir visité de façon intensive (11 séjours entre 1862 et 1884). Sa pratique de longs séjours et d’investigation systématique a généré une familiarité avec l’Algérie qui éclaire la tonalité particulière de son œuvre, tout à la fois exigeante, sensible et grave. Il meurt jeune à 47 ans.

Témoin de la conquête de l’Algérie et de l’histoire coloniale, Guillaumet dénonce dans ce tableau une situation dramatique, qui décime le pays entre 1866 et 1868 : un tiers environ de la population algérienne périt alors, touchée par les épidémies et la famine. En métropole, les pouvoirs publics et l’opinion sont alertés sur ce « fléau » qui n’est pas seulement imputable à la sécheresse, mais aussi à l’extrême paupérisation des populations rurales algériennes, dans le cadre de la colonisation qui confisque leurs terres.

Dans ce grand tableau où les figures sont peintes à échelle humaine, le jeune artiste peint avec les moyens de la peinture d’histoire, à la manière des Scènes de massacre de Scio de Delacroix, qu’il admire : révolté, il veut indigner le public et susciter sa compassion pour les victimes. Guillaumet est le seul peintre français à avoir tenté de figurer cet épisode tragique de l’histoire coloniale, en présentant son tableau au Salon de 1869.

Attaquer la terre et le soleil de Mathieu Belézi

PourQuoiPas un moment de littérature émancipatrice par Marine Descoubes et Bertrand Gilardeau

sur la clé des ondes Guide du Bdx colonial et Histoire de voir ...histoires au pluriel

Tableaux de Gustave Guillaumet 1840 1887

 

 

Assopourquoipas.org

 

i https://www.persee.fr/doc/rhmc_0048-8003_1984_num_31_2_1271

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