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Jaune une couleur, un symbole …. une Histoire …. des histoires au pluriel

Chronique ouvrière

Après le colloque des 16 et 17 novembre 2022 à Bordeaux sur les gilets jaunes : de la valse des ronds-points aux cahiers de doléances, il nous a semblé intéressant de revisiter des symboliques utilisées, comme la couleur jaune. Cette couleur tout au long de l'Histoire n'a pas toujours rencontré le même succès et n'a pas toujours eu la même signification suivant les époques et les civilisations. .
Comme on dit, les goûts et les couleurs, ça ne se discute pas mais elles ont aussi une histoire. souscrivez pour la sortie du livre de la valse des ronds points aux cahiers de la révolte 

Un sondage fait aux Etats-Unis en 2017, montre une stabilité permanente du goût des couleurs dans l’époque dite moderne .

C’est la couleur bleu qui est plébiscitée, (par 45 à 50 % des sondés, puis vient le vert entre 15 et 18 %, le rouge autour de 12 %, le noir entre 8 et 10 %, le reste se répartissant entre les autres couleurs

A ce sujet voir Eva Heller (1948-2008) a écrit un livre de référence « Psychologie de la couleur ». 1

Nous aurons donc tout à la fois une approche dans cette chronique ouvrière à la fois esthétique, symbolique et historique.

Pour cela, on s’appuiera sur les travaux d’historiens de l’art Michel Pastoureau, d’historiens, Zeev Sternhell (1935-2020), ou de linguistes  comme Maurice Tournier (1933-2013) et d’observations ou réflexions sur ce thème.

On pourra le constater, cette couleur fut attribuée de manière négative par le mouvement ouvrier, identifiant la couleur jaune à la traîtrise, au mensonge etc.

Elle fut utilisée depuis très longtemps par les autorités civiles ou religieuses pour ses qualités chromatiques afin d’alerter, d’attirer l’attention, pour informer, inquiéter, ostraciser, bref prévenir d’un danger et nous pensons ici à l’étoile juive ou à la rouelle, comme symboles d’exclusion d’une population.

Cette couleur jaune a été adoptée par les gilets jaunes, une partie de la population qui se considère exclue de la société. Le sens d’un signal d’alerte et de détresse profonde.

Comme quoi les mythes, les symboles ont la vie dure. Ils plongent leurs racines au plus profond des habitus de nos civilisations occidentales. 2

L’Histoire d’une couleur Jaune une couleur, un symbole

Parler d’une couleur sans citer les ouvrages de Michel Pastoureau, relève de la faute de goût et de l’amateurisme. Voilà qui est fait. Après avoir consacré des ouvrages au bleu, rouge et vert,  le grand spécialiste du symbolisme des couleurs, a publié en 2019, un ouvrage traitant de la couleur jaune abondement illustré.

Véritable histoire sociale, des sciences, de la mode, du vocabulaire sans oublier les mythes et croyances dans les sociétés européennes de l’Antiquité à nos jours en passant par le Moyen âge et les temps modernes, un an après le soulèvement des Gilets Jaunes.

Michel Pastoureau en décembre 2018 s’en explique dans une interview accordée à Libération : «Le jaune est la couleur des trompeurs mais aussi des trompés ».3

.Cette couleur jaune sest dévalorisée au fil des temps en Occident mais garde son ambivalence dans d’autres civilisations aussi. Alors qu’elle occupait une grande place chez les Grecs et chez les Romains, le jaune a commencé à se dévaluer au Moyen-âge, le traître Ganelon qui par félonie abandonna Roland à Roncevaux jusqu’au XXè siècle ou les maris trompés étaient affublés d’une cravate jaune. Pourtant le jaune reste la couleur papale ?
Le mauvais jaune, la couleur des hypocrites, de Judas et de la synagogue et le bon jaune, celui de l’or, du miel et des blés mûrs. La couleur est donc ambivalente et elle est synonyme de malédictions et malheurs avec l’étoile jaune, d’angoisses autour du péril jaune et ses invasions supposées.


Aujourd’hui le jaune reste peu utilisé sauf par les peintres, Van Gogh, Mondrian et beaucoup d’autres, mais la pub pour sa grande visibilité, le jaune permet de voir la couleur idéale des automobiles en mouvementSortira-t’il de son purgatoire a une place assez restreinte dans notre quotidien, même si un certain nombre d’éléments l’ont tout de même remis sur le devant de la scène :

Le maillot jaune du tour de France, certains peintres fauves, les vacances, les taxis à New-York, les boîtes aux lettres et bien sûr …………………..

les Gilets Jaunes qui ont à travers cette couleur interpellé comme autant de SOS colorés de leur situation de détresse un retournement du stigmate.. nous verrons ce que cela signifie plus bas.

 

Anecdote !

La poste Jaune une couleur, un symbole !

Nous relevons une anecdote découverte au court de ces recherches, sur l’origine de l’utilisation de la couleur jaune par la poste et les taxis new-yorkais.

A la fin du Moyen Age, une famille de petits seigneurs lombards dont on trouve la trace dès le VIè siècle, les Thurn und Tassis, met en place un système de courriers et va développer une organisation postale efficace.

L’héraldique de la famille utilise un cor de chasse sur fond jaune. Des couleurs visibles de loin. Par la suite, devenus des barons allemands, ils vont se charger de transmettre les courriers officiels, puis au fil du temps inspirer et organiser la poste européenne.

A la fin du XVIIè siècle en Allemagne, ils vont utiliser leurs relais de postes, les ouvrir aux passagers de leurs hippomobiles (diligences) ancêtres de nos taxis modernes.

Pour les reconnaître de loin, les véhicules des Tassis étaient peints en jaune donc reconnaissable. Pas anormal que cette couleur soit reprise pour les fameux taxis New New-yorkais et le cor de chasse dans la symbolique des postes des pays à forte immigration allemande.

Fin de l’anecdote historique

A propos de jaune un léger détour par la linguistique

Laissons la parole au linguiste Maurice Tournier extrait de son livre : PROPOS D’ÉTYMOLOGIE SOCIALE. TOME 1 Des mots sur la grève

« Rassemblés autour de l’idée toute simple que la langue est d’abord un produit social héritier des conflits dans lesquels elle s’est trouvée à la fois militante, médiatrice et dépositaire …. sollicité par les dissensions sociales, celui de la grève.

À la limite, l’incertitude de la désignation (association, grève) tendrait à faire oublier les enracinements du vocabulaire au cœur des représentations sociales et à faire croire aux définitions minimales et abstraites des dictionnaires, Or, il paraît clair aujourd’hui que le mythe d’une langue qui serait neutre a définitivement vécu.

Or, il paraît clair aujourd’hui que le mythe d’une langue qui serait neutre a définitivement vécu.

Les mots ne sont pas grains de sable sans poids dans le vent de l’histoire. Ils sont le vent et l’histoire. »

On pourrait ajouter que la couleur représente le fond de l’air qui n’est pas toujours rouge comme le filmait Chris Marker (1921-2012) dans son film le fond de l’air est rouge reprenant les évènements de la période des sixties ou la révolution était à l’ordre du jour.

Histoire et mouvement ouvrier : Le syndicalisme jaune

Le « syndicalisme jaune » (connu également sous les appellations de mouvement jaunesyndicats jaunes, « les jaunes » ou « droite prolétarienne ») est un mouvement syndicaliste  français, connu également sous cette dénomination dans d’autres pays, tant francophones qu’anglophones (« yellow unions »), et en Italie aussi (« i gialli »). Cette forme de syndicalisme (constitué en opposition aux syndicats « rouges », c’est-à-dire socialistes ou communistes) refuse certains modes d’action comme la grève et l’affrontement avec le patronat. Pour les grévistes, les jaunes sont les non-grévistes, désignant les « traîtres 

 Création des premiers syndicats « jaunes »

Plusieurs hypothèses circulent autour de l’assimilation de la couleur aux briseurs de grèves. On retrouve déjà chez Émile Zola  dans Germinal mais aussi dans ses enquêtes journalistiques sur les grèves ouvrières d’Anzin en 1884) l’opposition des couleurs entre le rouge et le jaune).

On retrouve cette césure plus loin en Californie dans les années 1870 ou le patronat exacerbe les tensions raciales entre la main d’œuvre européenne et asiatique moins exigeante pour les salaires, surnommée les rats ou les scabs 4, (ceux qui travaillent sous les conditions fixées par le syndicat), appelée les jaunes.

Mais c’est dans la fabrication des cigares que le syndicat impose en 1876, un label raciste, un anneau de couleur blanc, garant de l’hygiène et de respect des accords syndicaux pour se démarquer de ceux fabriqués par les asiatiques « fabriqués par des chinois galeux ….. »

La Convention des cigariers de 1880, remplace le label blanc par du bleu.

« La présente certifie que les cigares présentés dans cette boite ont été faits par un ouvrier de première classe, membre de l’Union Internationale des cigariers d’Amérique, c’est à dire d’une organisation qui combat le travail inférieur exécuté dans des boutiques où travaillent des rats et coolies …. »5

Revenons en France.

Au XIXe siècle, les usines Schneider au Creusot sont les plus grandes de France. Les bons salaires et les conditions de travail maintiennent la paix sociale dans l’entreprise depuis 1870. Cependant en 1898, toute une série de changements entraîne un bouleversement de la situation : les radicaux gagnent les élections de mai.

Eugène II Schneider, accède à la tête de l’entreprise ; l’afflux des commandes entraîne une accélération des cadences de travail sans augmentation de salaires.
De mai 1899 à juillet 1900, les usines du Creusot connaissent plusieurs accès de grèves, notamment entre le 31 mai et le 2 juin puis entre le 20 septembre et le 1er octobre. Le 24 septembre 1899 a lieu une grande manifestation réunissant plus de 7 000 personnes, au cours de laquelle les Creusotins remercient leurs voisins de Montchanin pour leur soutien. La question de la création d’un syndicat ouvrier indépendant est à l’ordre du jour.

Dès le 7 octobre de la même année de Schneider et Cie, le patronat s’appuie sur la décision d’une sentence arbitrale , signée directement par Pierre Waldeck-Rousseauprésident du Conseil,  autorisant la création de syndicats ouvriers à l’initiative de leur employeur.

Le 29 octobre 1899 est créé le « syndicat des corporations ouvrières du Creusot et de ses dépendances » par Eugène II Schneider.

D’après le préfet de Saône-et-Loire de l’époque : 

« Ce nouveau syndicat, formé à l’instigation de l’administration des usines, n’est composé que d’ouvriers favorables au patron et n’a d’autre but que d’entraver l’action du premier syndicat, organisé après la première grève dans un but d’émancipation ouvrière ».

A l’origine du qualificatif et de l’emploi du mot « jaune »

L’historien local René-Pierre Parize attribue la dénomination « jaune » à « la couleur du local où [le syndicat jaune du Creusot] tient sa permanenceD’autres le situe à Montceau-les-Mines.

Anecdote :

« C’est dans cette ville que fut donné le signal de la révolte des ouvriers indépendants contre les Rouges… Ils se réunissaient au Café de la Mairie, à Montceau-les-Mines , et leur groupement portait le nom de Syndicat no 2. 

« Effrayés, furieux de ce qu’ils considéraient comme une trahison, les Rouges résolurent de châtier ceux qui voulaient travailler et, pour ce faire, ils vinrent faire le siège du Café de la Mairie : ce fut une émeute…Quand ils furent débloqués par les charges de la police, les assiégés, qui n’avaient pas le choix des matériaux, remplacèrent, tant bien que mal, les carreaux cassés par des feuilles de papier « jaune » dont ils avaient un stock. I

lls étaient baptisés. Les Rouges, par dérision, appelèrent le siège social des Indépendants qu’ils avaient saccagé : Syndicat jaune. Depuis cette époque, nos organisations se parent orgueilleusement de l’épithète décochée en pleine bataille.

« Notre insigne est le genêt ; celui des Rouges, l’églantine. »

L’historienne Michelle Perrot  relève toutefois que l’adjectif jaune était déjà utilisé en 1897. 

De même, le lexicologue Maurice Tournier (cité plus haut) explique cette dénomination par la symbolique ancestrale de la couleur jaune et par « l’aptitude que possède jaune à fonctionner de manière adversative avec d’autres couleurs déjà politisées », en l’occurrence le rouge.

Il raconte notamment que « certains anti-grévistes du Creusot qui, retranchés dans l’usine, étaient ravitaillés avec de la charcuterie » étaient surnommés « les saucissons », un surnom qui ne pouvait pas se propager aussi efficacement que « jaune ». Maurice Tournier estime surtout que le succès de l’appellation « jaune » s’explique par une « inversion connotative volontaire », ce que la sociologie nomme un retournement du stigmate . C’est aussi l’analyse de l’historien Zeev Sternhell  :

« Invoquant l’exemple des croquants, des sans-culottes, des communards ou des gueux, selon les circonstances, [les briseurs de la grève du Creusot] revendiquent hautement l’épithète injurieuse ».

Jaune une couleur, un symbole !

Ce que confirme la création officielle d’une « Fédération nationale des Jaunes de France, et des colonies »  fondée le 1er avril 1902, par Paul Lanoir (1863- 1927), boulangiste hostile à la lutte de classe et au bolchevisme. C’est Pierre Bietry (1872-1918), qui prend la relève. C’est un transfuge de gauche qui pour anecdote, est le grand-père maternel de Pierre Salinger, journaliste et porte-parole de John Fitzgerald Kennedy.  Son existence s’achève en 1912.

Le mouvement est antisémite et d’extrême droite dès sa création. Paul Lanoir affirme son slogan dès mars 1902 qui se résume en trois mots : « Patrie, famille, travail », les termes que reprendra la devise du régime de VichyOn voit la filiation. 6

Selon Pierre Biétry lui-même, dans son ouvrage Le Socialisme et les jaunes, son but est de « réaliser la renaissance nationale en créant la réconciliation des classes sur un programme de justice sociale ».

Dans les faits, ce mouvement s’oppose vigoureusement au mouvement socialiste et il cesse d’y faire référence en 1904. Il est alors soutenu par les nationalistes jusqu’à certains organes radicaux qui pensent tenir là une force nouvelle capable de faire face à la gauche marxiste.

Financièrement, il est soutenu par de grands industriels, tel Gaston Japy, le duc d’Orléans ou la duchesse d’Uzès. Présent dans l’Est, le Nord de la France ou à Paris, on estime que le mouvement a atteint les 100 000 adhérents.

Extrêmement violent, le mouvement jaune rêvait, en 1909, de « clouer la charogne de Jaurès vivante contre une porte ».

Les jaunes après 1945

Les syndicats héritiers des Jaunes sont dispersés et changent souvent de nom : Confédération générale des syndicats indépendants (CGSI), Confédération française du travailConfédération des syndicats libres, Union française du travail, etc. 

D’une manière générale, les « jaunes » ont rejeté toute référence au fascisme, mais continuent à montrer une opposition frontale à la gauche et à la CGT. Cependant, selon leur pratique de cogestion, il leur arrive de cogérer des comités d’entreprise avec la CFTC, la CFE-CGC ou la CFDT.

Aujourd’hui, l‘expression « syndicat jaune » est le nom donné par les syndicats appelant à la grève à ceux qui n’y appellent pas.

Ils sont accusés d’être opposés aux conflits de classe et d’être conciliants avec le patronat. Ces accusations sont formulées, par exemple, lors d’un appel à ne pas faire grève lorsque la plupart des autres syndicats y appellent, ou lors de la signature d’accords de branche auxquels la plupart des syndicats sont opposés.

On pense à la CFDT qui récemment a signé un accord dernièrement dans le dos des grévistes des raffineries en grève.

Individuellement, un « jaune » peut aussi désigner un travailleur engagé par un patron pour briser une grève ou lors d’une grève, un travailleur qui compromet son efficacité en refusant d’y participer. 

Voilà pour les syndicats jaunes. Mais cela ne règle pas la couleur des Gilets, comme on va le voir

Et pourquoi les Gilets Jaunes ?

Jaune un symbole une couleur. Pour les Gilets de couleur jaune, rien à voir avec cette histoire de syndicalisme jaune ….. La symbolique des gilets jaunes c’est plutôt une forme en sociologie de retournement du stigmate (Eric Goffman Stigmate ), comme on l’a dit plus haut . 

Porter le Gilets jaune c’est manifester sa détresse individuelle et aussi collective. Un dernier appel au secours avant le naufrage. Le gilet jaune est bien ce signal d’alerte adressé à un régime et à ses institutions qui semblent restées sourdent, pour des raisons multiples et parfois contradictoires à leurs souffrances. Un signal d’alerte, qui se voulait apolitique. En ce sens il rappel le fantasme des syndicats jaunes niant la lutte de classe au profit d’une supposée entente entre les forces du capital et le Monde du travail. 

Le mouvement des GJ repose sur l’innocence et l’apolitisme vis à vis du pouvoir. Nulle contestation dans les premières manifestations du début, acceptation de l’autorité, de la police, de la justice et aucune critique du système capitaliste. Pourtant très vite les manifestants vont en la subissant violemment comprendre la réalité et la question sociale. Leur refus de la politique, c’est celui des politiciens professionnels, qui si tôt élu oublient leurs engagements. Ce refus de l’institution politique paradoxalement va les politiser dans un discours ou les rappels de la Révolution Française contre les privilèges devient d’actualité et rejoint la critique anticapitaliste.

En cela ils diffèrent du syndicalisme jaune et leur radicalité parfois désordonnée par leur volonté d’indépendance, leur méfiance du syndicalisme ouvrier classique et des partis organisés. Il faut tout de même se rappeler les énormes manifestations syndicales contre la loi El Boomer dite loi travail, pondue par un gouvernement sensé être de gauche, qui ont mobilisé massivement les syndicats dans le cadre de la loi travail en 2016 et 2017. Défiance écœurement vis à vis de ces trahisons du PS et de la défaite.

On ne peut donc comprendre ce soulèvement qu’a travers cet échec. Les Gilets Jaunes s’engouffrent ainsi dans la brèche ouverte par la défaite syndicale surprenant par sa masse dans un premier temps le pouvoir. Macron va réussir par la manipulation médiatique, les mensonges à les isoler, organisant de faux débats et avançant une alternative en agitant les cahiers de doléances pour espère t’il diviser les citoyens.

Hors nous l’avons vu dans notre colloque de la valse des ronds points aux cahiers de doléances, les revendications portées à la fois par les cahiers et les Gilets jaunes sont identiques notamment sur la question du RIC (Référendum d’Initiative Populaire).7

Le pourvoir a divisé ainsi la population, ce qui justifiera sa répression et sa violence contre ses propres citoyens. Cette impasse sur le débouché politique et la volonté de rompre avec ce système (électoral par exemple) la volonté de secteurs Gilets jaunes de répondre à la violence légale par la violence de la rue sera contrebalancée par l’occupation des ronds points et parfois la jonction avec le mouvement ouvrier au nom de la convergence.

Cette division est accentué par le rejet des syndicats institutionnels de salariés dont la plupart se sentent exclus, de par leur situation professionnelle (artisans, précaires, personnel de service …..). Cette exclusion ne touche pas les syndiqués qui pour beaucoup partagent le rond point et les revendications. La révolte repose sur le vécu et pas sur une analyse de classe. Alors la reprise de cette couleur n’est pas neutre et en tant qu’exclus, ils partagent ils se saisissent inconsciemment de cette couleur impopulaire pour mieux casser les codes. Mais en même temps ils défilent avec le drapeau bleu blanc rouge symbole de couleurs plus arc en ciel.

Les gilets jaunes avant 2018

A l’origine. En 2014, un article du Parisien  se demandait ainsi “Qui sont les gilets jaunes?“ 

À l’époque, on nommait ainsi des parents révoltés contre la réforme des rythmes scolaires, menée par le ministre socialiste de l’Éducation Vincent Peillon. La même année, une manifestation de travailleurs frontaliers à Saint-Louis (Haut-Rhin) avait également choisi ce vêtement commun. Des photos de cette marche ont d’ailleurs ressurgi après la manifestation du 17 novembre 2018 pour illustrer la très grande mobilisation. Mais l’AFP les avait finalement bien identifiées comme plus anciennes.

Pour le mouvement version 2018, c’est un utilisateur de Facebook, Ghislain Coutard, qui a lancé l’idée dans une vidéo publiée sur le réseau social le 24 octobre dernier,  en prévision des premières manifestations du 17 novembre 2018 : On a tous un gilet jaune dans la bagnole. Foutez-le en évidence sur le tableau de bord, toute la semaine, enfin jusqu’au 17. Un petit code couleur pour montrer que vous êtes d’accord avec nous, avec le mouvement, et qui est chaud, qui est pas chaud“, expliquait-il.

Plus de 5 millions de vues plus tard, le gilet jaune passe du pare-brise aux épaules des manifestants. Il devient ainsi rapidement le vêtement officiel des sympathisants du mouvement, à qui il donnera finalement son nom. Ce symbole de lutte, avec “des oubliés devenus bien visibles”, a même démarré son exportation dans différents pays. En écho au mouvement français, des manifestants ont choisi de le revêtir en Belgique, aux Pays-Bas, en Bulgarie, en Serbie.

A Londres, des pro-Brexit l’ont également adopté. Encore plus loin, l’Égypte a même interdit la vente de gilets jaunes jusqu’à fin janvier, craignant une contagion de la contestation. En Irak, à Bassorah, un mouvement des gilets jaunes est également apparu. Mais, comme le souligne Courrier International , la presse locale s’est un peu emmêlée les pinceaux en évoquant une reproduction du phénomène français.

Faux, répond un militant: “Nous sommes les premiers à en avoir arboré, dès 2015, quand nous voulions signifier que nous étions des éboueurs venus pour enlever les détritus politiques.”

De 2018 à 2019 en Europe et dans le reste du Monde de nombreux manifestants ont repris cette symbolique. Le mouvement des Gilets Jaunes a été moteur et la couleur jaune n’est est que plus brillante quittant ainsi peut être son purgatoire. Voir à ce sujet le joli film de Gilles Perret et François Ruffin, J’veux du soleilv

1 Éminemment subjectives, les couleurs appellent une palette d’effets et d’émotions fondée sur des expériences communes, profondément ancrées dans le langage et la pensée. Fondé sur une étude réalisée auprès de 2 000 personnes, Psychologie de la couleur se présente comme un recueil d’informations historiques, sociales, politiques et stylistiques sur les couleurs. Ont ainsi été répertoriés 160 émotions et effets divers ; de l’amour à la haine, de l’optimisme à la tristesse, de l’élégance à la laideur, de la modernité à l’obsolescence.

2 Références aux travaux du sociologues Pierre Bourdieu 1920-2002), sur les structures sociales.  L’habitus est pour lui le fait de se socialiser dans un peuple traditionnel, définition qu’il résume comme un « système de dispositions réglées ». Il permet à un individu de se mouvoir dans le monde social et de l’interpréter d’une manière qui d’une part lui est propre, et d’autre part est commune aux membres des catégories sociales auxquelles il appartient.

3 L’historien médiéviste Michel Pastoureau a savamment décliné l’histoire symbolique de toutes les couleurs, et de leur rôle dans l’imaginaire européen. Interview de Catherine Calvet dans Libé le 5 décembre 2018.

« Le bleu pour les conservateurs, le rouge pour les communistes et les révolutionnaires, le rose pour les socialistes, le blanc pour les monarchistes, le vert pour les écologistes, le noir pour les anarchistes, et même l’orangé adopté par le Modem. Quant au violet, il incarne les mouvements féministes depuis les années 1900, fusionnant plus ou moins en une seule couleur revendicatrice et égalitaire le rose féminin et le bleu masculin. Le brun est de sinistre mémoire. Reste le jaune. Jamais choisi en politique car c’est la couleur des traîtres. »

4Mots le langage en politique. Les Jaunes : un mot fantasme à la fin du 19è siècle. Maurice Tournier éd Persée p 124/125

5Signé Perkins, président des cigariers, accompagne encore, en 1896, un tract distribué à Chicago contre les cigares à bon marché, où il est dit « les cigares sans blue label sont positivement dangereux. »

6 Un syndicalisme impossible – livre de Christophe Maillard éd vendémiaire 2017

7 Le RIC (référendum d’initiative citoyenne) est au centre des revendications des Gilets jaunes. Son objectif ? Faciliter la consultation du peuple, sans associer le Parlement en amont comme c’est le cas pour le référendum dit “d’initiative partagée”

 

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Bientôt une livre des actes du colloque et de nombreux témoignage: les Gilets Jaune de la valse des ronds points aux cahiers de la colère…..

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