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Flora Tristan Au Pérou : 8 Septembre 1833 – 15 Juillet 1834

Flora Tristan au Pérou : 8 septembre 1833 – 15 juillet 1834

Flora Tristan au Pérou : une femme en fuite

1818, Flora et sa mère sont ruinées. Elles emménagent rue du Fouarre, dans le quartier misérable de la place Maubert à Paris. Flora est en âge de travailler. C’est ainsi qu’elle se présente à la porte de l’atelier du graveur-lithographe André Chazal, appartenant à une famille d’artistes.

Il l’engage comme ouvrière coloriste et en tombe amoureux. « Elle m’inspira une passion violente ». Le mariage est célébré le 3 février 1821 à la mairie du sixième arrondissement. Flora n’a pas encore 18 ans.

Ce mariage se transforme en cauchemar pour le couple. Chazal se révèle jaloux, et violent, quant à Flora elle aspire à une autre destinée : en effet, elle considère que la femme, en se mariant, est une esclave à vie (le divorce a été aboli par la restauration en 1816). A 22 ans, enceinte de son troisième enfant, elle quitte le domicile conjugal. A la naissance de sa fille Aline – la future mère de Paul Gauguin – elle lui jure de lutter pour un monde meilleur.

Flora, pour fuir son mari, abandonne ses trois enfants à sa mère, s’engage comme dame de compagnie auprès des sœurs Spencer, deux anglaises qui voyagent en Angleterre, Italie, Suisse, Allemagne. 

En 1829, toujours en fuite, elle rencontre en compagnie d’Aline, un capitaine de navire marchand, Zacharie Chabrié, revenu du Pérou et qui connaît l’oncle Pio, le chef de famille des Tristan, frère cadet de son père. Elle confie une lettre pour sa famille péruvienne au capitaine.

Dans cette lettre, elle raconte toutes ses difficultés, financières mais évite de parler de sa situation familiale. Elle reçoit une réponse affligeante, dans laquelle l’oncle Pio refuse de considérer sa mère naturelle comme légitime, surtout sur le plan de l’héritage. Sa grand-mère est plus enthousiaste et elle reçoit un pécule pour pouvoir les rejoindre au Pérou.

En 1832, les disputes conjugales entre Flora et Chazal dégénèrent. Elle perd Alexandre son plus jeune fils, malade, doit abandonner son deuxième enfant Ernest à la garde de Chazal et doit placer, sa fille Aline en pension à Angoulême. Elle rejoint Bordeaux en janvier 1833, logée dans l’ex Hôtel de Nairac cours de Verdun, chez un cousin des Tristan, Pedro Mariano de Goyeneche, homme de lois et consul du Pérou.

Elle embarque en avril sur le bateau, « Le Mexicain », commandé par … le capitaine Zacharie Chabrié, qui ​s’éprend d’elle et veut l’épouser. Bien que connaissant son statut de mère célibataire (il connaît la petite Aline), il ignore son mariage avec Chazal. Sur sa condition de mère-célibataire, elle lui demande la plus grande discrétion et en fait son complice.

Les rencontres, les ruptures et la vie du Capitaine Zacharie Chabrié ici.

                                                                 Le port de Bordeaux  dessin de Civeton, gravée par Couché et Chamoin

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Flora Tristan Au Pérou : Le Capitaine Zacharie Chabrié

Flora Tristan au Pérou : le capitaine Zacharie Chabrié

Flora Tristan a croisé dès 1829 le capitaine Chabrié lors d’une de ses fuites pour échapper à la colère de son Epoux André Chazal. Elle était avec sa fille ALine et le hasard a voulu que ce personnage connaisse la famille pérvienne de Flora. Chargé d’une lettre, pour les Tristan au Pérou, grâce à cette intervention, elle put renouer les liens avec l’oncle Pio. Le hasard ( ?) fit qu’elle le retrouva quelques années plus tard à Bordeaux et qu’elle embarqua sur le bateau du capitaine. Pour le moins une étrange et complexe intimité les réunit pendant la traversée vers Arequipa.

Mais qui était  …..

Le Capitaine Zacharie Chabrié

Né à Lorient, le 17 germinal en V (6 avril 1797), il est mort en mer, aux environs du Cap Horn, en janvier 1836.

Le capitaine Zacharie Chabrié a 36 ans. Il a commencé par une carrière d’officier de la marine française puis en 1815, il choisi le commerce et depuis, il sillonne les mers en compagnie de son second, Louis Briet, lui aussi originaire de Lorient, ancien officier de la garde impériale.

Dans les Pérégrinations d’une paria, Flora rapporte les sentiments que lui inspire le commandant. Elle s’est imprudemment engagée dans une relation sentimentale durant le temps de la traversée, et la rompt à Arequipa. 

C’est le 7 avril 1833, jour anniversaire de ses trente ans qu’elle part sur le vapeur qui l’amène de Bordeaux à Pauillac, pour embarquer sur le Mexicain.

Le Mexicain est un brick de 200 tonneaux bien aménagé, mais un peu exigu. À bord, six passagers, 15 hommes d’équipage et Flora l’unique femme qui sera très bien traitée, avec égard par le capitaine et l’équipage.

Elle est accueillie par Chabrié, très ému : « de grosses larmes tombaient de ses yeux. Je le tirais vers moi, d’un regard sympathique, il me dit : il faut du courage pour s’éloigner de son pays et quitter ses amis ; mais j’espère, Mademoiselle, que nous les reverrons… » 

Laissons la parole à Flora Tristan pour définir l’homme :

« Monsieur Chabrié a beaucoup d’esprit naturel, la répartie toujours prête, des saillies étonnantes de naïveté et d’originalité … ce qu’il y a de plus remarquable en lui, c’est l’extrême bonté de son cœur et l’exaltation de son imagination. Quant à son caractère, c’est bien le plus affreux caractère que j’ai jamais rencontré… à la première vue, Monsieur Chabrié paraîtrait commun ; mais causons quelques instants avec lui, on reconnaît bien vite l’homme dont l’éducation a été soignée. »

Cette description du caractère de Chabrié, est complétée par l’observation de son physique qui n’en fait pas un Don Juan mais au cours de cette traversée, entre son mal de mer permanent, la solitude, les frasques de l’Océan, elle apprécie l’homme :

« Il est d’une taille moyenne et a dû être bien fait avant d’avoir pris de l’embonpoint. Sa tête, presque entièrement dégarnie de cheveux, présente, sur le sommet, une surface dont la blancheur contraste d’une manière assez bizarre avec le rouge foncé qui colle à cette figure. Ses petits yeux bleus, abîmé par la mer, ont une expression indéfinissable de malice, d’effronterie et de tendresse. Son nez est un peu de travers, et ses grosses lèvres, si affreuses quand il est en colère, si gracieuse quand il rit de ce rire naïf qu’ont les enfants, donna cet ensemble une expression tout à la fois de franchise, de bonté, et d’audace… Le capitaine Chabrié a manqué sa vocation…. Il était fait pour chanter à l’opéra…. Pour compléter le portrait, j’ajouterai que le capitaine Chabrié est très recherché dans sa mise, il en est même coquet. »

La rupture

* Flora Tristan au Pérou ArequipaSi elle avait écouté, avec une complaisance mêlée de crainte, ses déclarations et sa proposition de mariage, (n’oublions pas que Flora était officiellement mariée), elle rompit définitivement avec lui à Arequipa de façon cruelle. Chabrié fou d’amour exigeant le mariage. La bigamie étant interdite au Pérou comme en France, elle n’eut d’autre alternative que d’exercer un chantage :

– elle exigeait qu’il commette un faux, attestant le mariage légal de ses parents, Mariano de Tristan et Anne Pierre Laisnay. Ainsi le document lèverait les obstacles juridiques dressés par son oncle don Pio, à sa pleine reconnaissance comme nièce et à son entrée en jouissance de la part d’héritage qui lui reviendrait alors.

Zacharie Chabrié, refusa et la quitta sur ces mots définitifs : « Je vous hais autant que je vous ai aimée. »

Le lendemain, il lui écrit cette lettre :

« Mademoiselle,

Au moment de vous quitter, probablement pour toujours, Je viens vous dire adieu… Je sens combien vous allez rester seule et malheureuse après l’amour vrai et dévoué que vous venez de perdre… Je n’ai pas besoin de vous dire tout ce que votre étonnante conduite…A de poignant, d’affreux pour moi. Je vous quitte pour toujours… Ah ! Flora, je ne souhaite pas que vous compreniez ce qu’il y a de douleur dans ce mot toujours !

Comme les faibles services que je pourrais vous rendre n’auront lieu que dans le cas où il vous arriverait un événement funeste, je ne vous les offre pas pour vous ; Mais je vous le répète, que votre dernière heure soit douce, votre fille trouvera en moi un ami qui lui fera aimer la mémoire de sa mère.

Adieu ! Adieu pour toujours !

Z. CH

Arequipa ce 29 octobre 1833 »

A la fin de cette aventure, Zacharie Chabrié s’établit. Il se marie avec la fille de l’un de ses associés dans l’entreprise commerciale du Mexicain, le capitaine B. Roux. Il fonde avec l’autre, Alfred David, une maison de commerce à Guyanas, dans le golfe de Californie, au Mexique.

Mais cette nouvelle vie ne dure guère. Parti de Bordeaux le 21 novembre 1835, à bord d’un vaisseau neuf l’Amérique, dont il était propriétaire pour moitié avec son beau-père, il disparut en mer, au large du Cap Horn, en janvier 1836. Les recherches menées pour retrouver le navire et ses passagers restèrent vaines.

Flora Tristan rapportera brièvement la mort de Zacharie Chabrié dans les Pérégrinations.

Un dernier rendez vous avec Chabrié(r) en Angleterre

En mai 1839, Flora est à Londres pour son quatrième séjour : 1826,1831,1835,1839. Elle connaît bien le pays et décide de mener une enquête sur la société anglaise, sur les conséquences de la révolution industrielle. Elle y fera des rencontres importantes, s’immergera dans les milieux les plus divers ce qui en fera la première chroniqueuse sociale, inspirant Engels, plus tard Gustave Doré et peut être Jack London pour son roman « Le talon de fer ». Elle fréquentera les milieux chartistes, le plus important mouvement ouvrier européen d’avant 1848, et même accédera dans des conditions rocambolesques à la Chambre des Lords, bien que les femmes y soient interdites, habillée en musulman oriental, avec la complicité d’un haut personnage turc. Ces expériences sont relatées dans son livre Promenades dans Londres Publié en 1840.

Elle décrit cette société londonienne, les souffrances et la violence du capitalisme, au prix de la sueur, des larmes, de sang . Décrivant ces crimes de l’exploitation inhumaine, dénonçant la prostitution, les vols d’enfants, constatant les conditions ouvrières criminelles, l’avilissement des femmes, le racisme anti juif et anti-irlandais, l’absence d’hygiène … bref les maux d’une exploitation sans limite et prouvant ainsi la nécessité de s’organiser pour y répondre.

Mais il est une dernière anecdote touchant Chabrié qui se situe en Angleterre. Flora ne pouvait y rester insensible lorsqu’on lui annonce l’existence d’un marin français portant ce nom à l’asile de fous de Bedlam près de Londres. Elle se rend sur place ; ce n’est pas Zacharie Chabrié, mais un un homonyme, un autre Chabrier,

Elle dialogue avec ce malade, grand voyageur, cultivé, mystique, se présentant comme le nouveau Messie, qui se croit investi d’une mission par le Seigneur, celle de « faire cesser les servitudes, d’affranchir la femme de l’esclavage de l’homme, le pauvre de celui du riche et l’âme de la servitude du péché. »

Flora est bouleversée, troublée et s’interroge sur la notion de folie, car cet homme, nommé Chabrier (le vrai, elle le sait a disparu en mer en janvier 1836), la charge et l’investit de mener cette mission. Ces coïncidences la troublent profondément. En sera-t’elle inspirée, elle, la future « prophète »  ?

 

 

Pour clore définitivement avec Zacharie Chabrié, il faudra attendre le 14 mars 1864 (28 ans après sa disparition en mer) pour qu’un jugement de disparition définitif, acté à Bordeaux soit publié dans le Moniteur Universel

 

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